Louis
Cappatti, 1927
L’an dernier, l’exposition du «paysage
niçois» rassemblait les peintres inspirés
par la Provence orientale. A l’inverse du «paysage
français», réunissant les interprétations
que nos nationaux avaient faites de la nature, la société
des beaux-arts avait groupé, du XVIIème siècle
à nos jours, les hôtes de passage et nos artistes,
tous ceux qui ont planté leur chevalet sur le sol
étonnamment varié de notre comté, où
l’alpe éternellement blanche couronne les collines
bleues et le rivage d’hiver printanier. Renoir, cyrile
besset, harpignies, ziem, monticelli voisinaient avec carlone
et fossat. Bessy, ed.Fer. martin sauvaigo et G.A. mossa
mettaient côte à côte leurs œuvres
si différentes et pourtant animées du même
amour de la petite patrie. Villeri avait été
convié à cette manifestation. C’est
au roi de nos sites, à l’olivier, qu’il
rendit hommage. Son envoi était d’une puissante
simplicité, d’une émotion si sincère
qu’il attira la sympathie admiratrice. Son entrée
au musée de nice s’imposa.
Toile forte et pleine de poésie ! des paysannes sont
agenouillées,
occupées à la cueillette sur le champ vibrant
de lumière où rampent les ombres violettes
des branches et des troncs noueux.Dans le fond, la petite
maison, à l’escalier accueillant, parait comme
méditative dans une pacifique douceur. Aucune convention
ne fige la nature. Tout est vrai. Villeri se révèle
l’homme qui sait voir, se fondre dans cette contemplation
absolue qui, seule, prépare l’expression vigoureuse.
De son oeuvre d’observation profonde se dégage
un respect attendri des vieilles choses, un sentiment de
pitié sereine pour l’humble labeur. Son tableau
fait penser.
Depuis le «paysage niçois», villeri n’a
cessé d’être un fidèle de nos
salons. Il a présenté des visions de la Riviera,
aux blanches villas, de blondes pinèdes, de lumineuses
oliveraies. Il nous a fait voir les petits villages, aux
pierre brunes, aux tuiles fanées, comme crispés
dans une lente agonie. Il nous a montré la rudesse
sauvage du Haut-comté. Imprégné de
notre midi, il nous a épargné les tons criards.
Rompant avec cette tradition qui faussement drape nos sites
de couleurs crues sous un soleil aveuglant, il montre notre
paysage réel, des cieux tendres, l’enveloppement
de lumière, la buée blanche et cette sorte
de fumée bleue qui fait planer le mystère
sur les silhouettes des coteaux.
D’un trait heureux, villeri sait rendre la vie. Vous
pénétrez avec lui dans l’âme des
personnages aussi bien que vous saississez l’âme
des lieux. C’est vraiment un marché qu’il
vous présente. Ces passants font un choix. Ces plantureuses
«pescaïris» niçoises, auprès
de l’antique maison rose que le soleil illumine, font
le geste d’offrir ou calculent devant l’étal
grouillant de marée fraîche.
Les aquarelles largement traitées de villeri le rattachent
à la phalange des indépendants illustrée
par valtrat, Picart le Doux, Edouard Fer, Vlaminck, de Waroquier.
L’artiste n’est pas un de ces esclaves du détail
qui regardent le monde par le petit bout de la lorgnette.
Avec un art parfait, les parties saillantes sont mises en
évidence. Les masses sont équilibrées.
Avec la logique d’un méditerranéen,
un esprit sain et profond, villeri ajoute sa personnalité
à la nature : il crée de la beauté.
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